Croix Prud'homme
jeudi 24 décembre, 01h00.
Journée de travail aujourd'hui avec en particulier un lâcher de ballon
"ozone" en début d'après-midi. Immense ballon qui doit supporter la
lourde charge que constituent un ensemble complet de mesure de l'ozone et
une sonde météo classique. Les mesures ont confirmé la très bonne tenue
de la fameuse "couche d'ozone" (qui n'en est pas vraiment une) cette
année au-dessus de nos têtes fragiles.
Quelques nouvelles de nos camarades
ayant embarqué sur l'Astro : ils sont toujours englués dans un pack très
dense et épais et n'ont que très peu progressé ces 24 dernières heures.
Quant au raid, malgré des conditions peu favorables (chasse-neige sur le
continent), il s'est ébranlé hier et devrait rallier Concordia d'ici 10
jours.
Ce soir, je profite de la magnifique lumière polaire pour m'en mettre
plein les mirettes. Comme j'en ai maintenant l'habitude, avant de quitter
mon poste à 22h15, j'avais l'ambition de faire un grand tour et
finalement, une petite balade de 250m en face de la météo m'a suffit pour
me rassasier en chocs esthétiques pour la soirée. Au programme donc,
descente de la grosse congère arasée devant notre bâtiment "25" en
direction du nord-ouest et le Cap des Barres, qui constitue la pointe
nord de l'île des Pétrels. Je croise la route de quelques Adélie. Je
trépigne de ne pas encore avoir mon télé-objectif. Je continue mon chemin
et les colosses que sont nos voisins "de droite" les bergs émergent. Le
Soleil effleure le continent et les cirrus derrière ces montagnes de
glace -- très blanches -- prennent une teinte saumon-orange. Le contraste
est superbe. Au loin, les bergs sont encore éclairés de face. La photo de
ce soir illustre la vue que Dame Nature nous offrait vers 23h40.
Je me suis arrêté quelques minutes devant la Croix Prud'homme, érigée ici
en hommage à André Prud'homme, deuxième météo à hiverner à DDU, au cours
des TA 4 et 8. Et c'est la veille de l'arrivée de la relève lors de son
second hivernage que l'on a perdu toute trace de lui. Très
mystérieusement et simplement évanoui dans ce paysage grandiose. En
admirant la vue qu'il devait à peu près avoir devant les yeux au moment
de sa disparition il y a 51 ans, mille pensées m'ont traversé. Voilà...
je lui rend très modestement hommage à travers ce petit billet.