Ainsi toujours poussés vers de nouveaux rivages...
samedi 6 février 2010, 22h30.
Le temps file. Vite. Trop vite. J'aimerais stopper son cours, comme lorsqu'autrefois je faisais des barrages dans les ruisseaux. Ralentir son débit, beaucoup trop intense. J'aimerais avoir le temps de le sentir filer mollement entre mes doigts, voir dans une journée un édifice implacable, qui serait construit et que je pourrais visiter à l'envi dans mes souvenirs futurs. Au lieu de cela, les semaines défilent à une allure incroyable et j'ai peur de rater tant de choses. L'été ici, c'est un laps de temps précieux, en quantité très limitée. Il faut en prendre soin. Le bateau arrive dans 4 heures. Dans 5 jours, beaucoup de mes compagnons de quelques semaines vont de nouveau nous quitter.
Matinée assez intense : entre avion, bateau et toutes les activités logistiques, la météo a été une nouvelle fois fortement sollicitée. Cet après-midi, je me suis offert un petit plaisir en passant quelques heures avec une nouvelle équipe ornitho, Claire, Marion et Thierry -- cette fois pour contrôler les poussins d'une colonie spécialement dédiée. Plus précisément, le but de la manip' est d'établir une liste exhaustive des poussins présents avec leur poids, la taille de leurs ailerons et de leur bec, ainsi que de les équiper d'une petite puce identificatrice permettant de connaître leurs allers et venues dans la colonie. En effet, aux deux extrémités de la colonie sont situées des passerelles sur lesquelles les manchots doivent immanquablement passer, équipées de "lecteurs", permettant de reconnaître chaque individu. En pratique, il s'agit d'attraper les poussins sans trop semer la panique parmi eux puis de les tenir au calme de sorte à ce que nos spécialistes puissent effectuer mesures et transpondage. Je n'ai malheureusement pas de photo à ma disposition ce soir, mais j'en mettrai une dès que j'en aurai récupéré ! A passer plusieurs heures sans trop bouger et dans le vent, cette activité requiert une certaine résistance au froid. Bien entendu, la bonne humeur et les réactions parfois étonnantes des manchots font oublier les morsures du vent.
A chaque rotation du bateau, un nouvel équilibre est à trouver -- je dois bien avouer que c'est un peu épuisant. J'aimerais juste que le temps reste suspendu, là, tel que nous sommes, prêts à basculer, au bord de notre hivernage mine de rien imminent maintenant. Cette époque de ma vie est si lumineuse...